La reconnaissance de l’Etat palestinien par l’Espagne accroît les tensions avec Israël, qui restreint l’activité consulaire espagnole à Jérusalem.
Peinte en rouge et vert – les couleurs de la Palestine –, une reproduction de Guernica, de Picasso, symbole de l’horreur de la guerre, occupe le mur d’une salle où se pressent des dizaines de journalistes, mardi 28 mai, dans ce qui était jusqu’alors la délégation générale de la Palestine en Espagne. Représentant de l’Autorité palestinienne en Es, en poste depuis 2022, Husni Abdel Wahed a décidé d’organiser une première conférence de presse en qualité d’ambassadeur quelques heures à peine après que l’Espagne a reconnu officiellement l’Etat de Palestine, en conseil des ministres, sur la base des frontières de 1967. « Ce n’est pas seulement une question de justice historique, mais c’est aussi la seule manière d’avancer vers la paix », a estimé le président du gouvernement espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, lors d’une allocution solennelle le matin même.
Dans ce palais du nord de Madrid, devenu une ambassade, les premiers mots de M. Abdel Wahed, ancien ambassadeur de la Palestine en Argentine, 64 ans, vont d’abord aux victimes palestiniennes du « génocide » que commet, selon lui, Israël à Gaza. Il a cependant tenu à « célébrer » le « pas très important » accompli par l’Espagne, ainsi que par la Norvège et l’Irlande, qui « réaffirment leur engagement envers l’avenir, la paix et la liberté » du peuple palestinien, explique-t-il. « La reconnaissance en soi n’est pas un objectif, mais un pas nécessaire pour d’autres pas qui doivent se concrétiser dans la solution des deux Etats », ajoute-t-il. Quant à savoir la portée concrète de cette reconnaissance, il estime que « si elle était seulement symbolique, Israël n’aurait pas réagi avec une telle véhémence ».
Lire la synthèse | Article réservé à nos abonnés L’Espagne, l’Irlande et la Norvège décident de reconnaître ensemble la Palestine comme un Etat
Déjà tendues du fait des fortes critiques de Madrid à l’égard d’Israël, depuis le début de l’offensive lancée sur Gaza après les attentats du Hamas du 7 octobre 2023, les relations bilatérales se sont encore dégradées ces derniers jours. Israël a rappelé son ambassadrice en Espagne et, surtout, a interdit au consulat d’Espagne à Jérusalem-Est de fournir ses services aux Palestiniens.
« Récompense » au Hamas
Non seulement, le ministre des affaires étrangères israélien, Israel Katz, voit dans la reconnaissance de l’Etat de Palestine une « récompense » au Hamas, mais il s’est montré indigné par les propos « antisémites » de la ministre du travail espagnole, Yolanda Diaz, numéro trois du gouvernement et par ailleurs dirigeante du mouvement de gauche radicale Sumar. Le 24 mai, celle-ci a diffusé une vidéo se félicitant de la reconnaissance de l’Etat de Palestine et concluant : « Nous ne pouvons pas nous arrêter là : la Palestine sera libre de la rivière à la mer. » Sur le réseau social X, M. Katz, est allé jusqu’à publier la photo de Mme Diaz, mardi, entourée de celle du dirigeant du Hamas, Yahya Sinouar, et de celle du Guide suprême iranien, Ali Khamenei, comme l’une de ceux qui « appellent à la disparition de l’Etat d’Israël et à l’établissement d’un Etat terroriste islamique palestinien ».
                                      Lemonde